Zahir

A la Lune ironique et aux larmes dans nos yeux,
Le souvenir d’hier est un phœnix de joie
Dont les cendres un peu froides rappellent nos effrois
Et qu’adieu est un mot que nous épelions à deux.

Au soleil après tout, qui éclaire nos pas
Cette empreinte qui fut celle du lendemain
Qu’en se retournant, en regardant tout ce chemin
Nous ne voyons que l’avenir par devant soi

A l’étoile flamboyante, penché sur ma lettre,
Avais-je senti que tu m’apprendrais à être
A construire ce que je ne savais pouvoir

Zarathoustra, tu m’as appris la mort de Dieu
Zéphyr, tu m’as appris la beauté de l’espoir
Zahir, ne faut te fier car je n’ai que mes yeux.

A Perdre Pied

Je ne suis Orateur, mais je sais ce qui touche
Maniant le contre-point, le point et la virgule.
Quand tous les mots, torrent, se pressent à ma bouche
Qui n’ose s’exprimer, par peur du ridicule.

Que sur le papier, modeste, ma plume couche
Quelques nouveautés en jouant de particules
Je manque d’avoir pied, me noie et gesticule
Pourtant mordant, à la fin de l’envoi, je touche!

Sans avoir de l’esprit, j’ai osé y prétendre
En vers de marmiton, tant que la chair est tendre
Je serais Ragueneau de la pièce montée.

Je taille chaque mot pour faire un monument
Mais n’ayant mesure, ils finissent en pavement
Mes vers piétinés sont ainsi de mille pieds.

Le Don de Dieu

Écoutez moi, je vais vous conter une Histoire
Avant nous, quand Dieu, dans son infinie sagesse,
A doté l’Homme de génie et de paresse
Transformant un défaut en un rayon d’espoir

Quand voulant nous offrir le plaisir et la joie,
Il nous donna les vices qui grandirent en espèce,
Prêtant à l’amour des allures de détresse
Mais offrant à nos cœurs le péché et l’émoi.

Croyez vous qu’un tel être ai omis de penser
Que souffrir serait prix pour ceux qui ont aimé?
Le doute insidieux derrière chaque baiser

Est un prix que je paye de toute dévotion.
Écoutez moi, car voici les passions
Qui naissent et qui détruisent l’ennui et l’amitié.

Le Crachat

L’abîme a des échos que l’on dirait d’éther,
Est-ce pour cela que s’y penche le poète
Pour entendre le crachat rencontrer la Terre
Ou au berceau du jour chanter l’alouette?

L’abîme d’un écho rebondit sur nos têtes
Et nos cœurs le peuplent de démons bien trop austères.
Pourtant c’est en ces lieux que chante la fauvette
Où dansent les satyres du Seigneur Lucifer

Regretteras-tu tes gages quand ton tour viendra
En tendant ta main moite à ma statue de marbre
Le valet figaro devenu potentat

C’est grave pour que chante, l’oiseau à la lunaire
Majesté qui s’ennuie des rimes et de mes vers
Couchés pour ne pas plaire sur l’écorce d’un arbre.

L’Abandon

C’est dans tes mots que je m’égare et que j’oublie
Dans tes cheveux, que je sens mon cœur qui s’arrête
Entre tes bras serrés, que j’ai appris à être
Et dans tes yeux, qu’enfin, je comprends que je vis

C’est dans tes maux que j’ai laissé tous mes soucis
Dans tes paroles que roulent mon horizon
Entre tes lèvres que j’ai connu la boisson
Et l’ivresse m’emporte dès que tu me souris

Je vieillis, tu diras, mes cheveux tombés blancs,
Ce n’est pas très discret, mais je reste un enfant
Quand voudrais je grandir si ce n’est avec toi?

Illettré, tu m’as donné les mots pour t’écrire
De parole, tu m’as tendu la main pour construire
Nous apprendrons, je serais toi, tu seras moi.

Un éclat de Pierre

C’est dans la nuit, au plus profond de nos oublis
Quand la lumière se dérobe et nous révèle
Que le visage défait, les masques détruits
Sorti du Tombeau, je me sens pourtant des ailes

Je ne suis pas Nerval, et la Mélancolie
Ne m’aura pas, à genou, pleurant devant elle
Les flammes sont pour moi, des rappels de la Vie,
Comme autant de cris, des plaies chargées de sel.

Alors rappelez moi, pourquoi devoir se battre
Levez le poing et la tête enfin, débattre?
Toi qui m’a consolé, me rendras tu hier?

Tu m’as appris à haïr avant de t’aimer
Tu as fait de la pierre, un éclat incendiaire,
Recevant sa Lumière, j’ai appris le péché.

No Se

Je ne sais si des dieux, impatients et narquois
En leur ville éthérée, ont choisi pour mon jour
Nos rêves d’éternité à s’en passer le tour
En offrant à tes yeux la rose en sang et soie

Seulement, si heureux, puis je dire pourquoi
A la nuit tombée, les larmes coulent toujours
Inondant tes baisers, tes mots et tes détours
Sous le tumultueux flot de sang et d’éclats

Dieux, que la chair est tendre, dans vos mains de colosses
Ici les vies broyées, là y affleure l’os
Suffit-il à vos coups que nous soyons soumis?

Mais je ne crois des dieux que leur masque irritant
Où l’illusion viciée d’un prêtre grimaçant
Inspire à tout mon être, un frisson de mépris.

A la Notre!

Je veux lever mon verre à la noble assemblée
Qui aujourd’hui se tient réunie en ces lieux
Nous avons tant appris, et c’est avec fierté
Que je peux annoncer que nous sommes heureux

En cet an écoulé, nous aurons su briser
La spirale de notre effondrement vicieux
Et construire des bases qui peuvent supporter
Nos projets qui seront des plus audacieux

Mais la pièce est vide et je reste seul ce soir
A lever mon verre, l’abaisser et le boire
Je parle à mon reflet et l’insulte à mon tour

Dieu que la nuit est belle, il est temps de partir
Quand je vois dans le ciel les étoiles mourir,
Je finis par espérer que je verrais le jour.

Bonne Nuit!

Dans l’obscurité et la nuit, quand nos dents claquent
Et notre cœur frémit, que des abîmes montent
Des gestes non finis, les monstres qui des contes,
Jaillissent sous nos lits en ordre démoniaque.

Ces armées silencieuses assiègent l’insomniaque
Qui n’ose ouvrir les yeux, redoutant dans sa honte
De ne voir que la nuit de ceux laissés pour compte
Quand la lune éclaire le sourire du vieux Jack.

Alors les yeux bien clos, affrontons les enfers
Bravons donc ces légions à l’éclat mortifère
Contre des succubes, des démons et nos rêves.

D’affronter le néant, il nous aura suffit,
Essayant de scruter nos fantasmes partis.
Faut il d’autres monstres, que ceux qui nous relèvent?

L’anatomie du désespoir

Sur la route nous cheminons, seul ou par deux
À passer hier et à voir demain, mourir
Ce n’est pas comme si nous nous voyons partir
Et pourtant tel Orphée, ne tourne pas les yeux.

Devant toi, ce n’est plus qu’un sentier pierreux
Où tes pieds incertains dansent pour en finir
Contre l’Appel dernier, tu joues à mentir
Et c’est face à toi même qu’il faudra être heureux.

Depuis longtemps la piste s’est interrompu,
Toujours debout… bravo. Mais, dis moi, où vas tu?
C’est la falaise devant toi, choisi maintenant!

Cent fois tu as voulu, il te suffira d’Une
Qu’au matin on recouvre ton corps sur les dunes.
Ou détourne toi et laisse couler le Temps.